vendredi 22 octobre 2010

Marathon de Vannes - Le CR de Bruno

Un an sans marathon. Certes, je n’ai pas arrêté de courir, il y a eu la saison de cross que j’aime tant, un nouveau record sur 10 km, quelques déceptions, beaucoup de bons moments.

Dès que je me suis à nouveau glissé avec délice dans la peau du marathonien en préparation, une fois encore cette certitude s’est imposée : Le marathon, c’est LA distance, c’est MA Quête ! Bons comme mauvais, je n’ai que des souvenirs grandioses sur cette distance.

Le marathon, je le respecte, je l’aime, je le chéri, je le rêve.
Le mythe et la distance inspirent le respect. Cette fois encore, j’ai fait mon maximum pour réussir ma course. Tout a commencé au restaurant avec mon entraineur Charlie. Au menu : analyse des précédents marathons. On compare les préparations, les gestions de courses, le poids, les fréquences cardiaques et les résultats ! Charlie fixe l’allure : 4’25’’/km. Je suis plutôt effrayé, c’est trop rapide ! Mais le bougre a de solides arguments, étayés de constats irréfutables. Si je ne m’enflamme pas et avec une belle préparation, j’en suis capable !

Six semaines plus tard, je suis prêt. Tout s’est passé idéalement. Une semaine de fatigue parfaitement gérée, j’ai réussi de très belles séances tout au long de la préparation. La comparaison avec l’année dernière ne laisse aucun doute : je suis plus fort.
Restent les 2 semaines de relâchement à passer. Ce sont pour moi les plus difficiles. Celles où je cours moins et où l’approche de l’échéance apporte questions et doutes.

A une semaine de l’objectif, une dernière inquiétude : je me sens fatigué, les jambes ne répondent plus… je cogite. Trois jours plus tard, les doutes sont oubliés. La forme revient au bon moment, je me sens plus fort que jamais, prêt à en découdre.
Et presque serein. Je dis bien presque, parce que même s’il s’agira de mon 10ème marathon, je ne fanfaronne pas. Alors qu’on me demande plusieurs fois par jour quel est mon objectif, je réponds sobrement « moins de 3h15 », juste de quoi battre mon record (3h17).
Pourtant, j’ai des rêves de 3h10, et encore, uniquement parce que je sais que le parcours est difficile à Vannes. Mais ça, je ne le dis à personne ou presque. J’ai appris à mes dépens à être humble face au Marathon. Seuls mes amis coureurs les plus proches savent la vérité de mes ambitions.


Samedi 16 octobre. C’est parti. Je retrouve mon copain Thierry pour faire la route. Thierry, c’est mon frère de course, avec lui c’est une histoire d’Amitié avec un ‘A’ majuscule.
Thierry prépare les championnats de France de Marathon, le 14 novembre à Nice. Il vient à Vannes courir le marathon en duo : 19 km pour son coéquipier, 23 km pour lui.
La route de Rennes à Vannes me paraitra très courte. C’est qu’on a beau se voir presque tous les jours, se téléphoner et clavarder encore plus souvent, on a toujours des choses à se raconter.

Arrivés au village, nous sommes plongés dans "l’ambiance marathon". C’est comme sur les autres courses mais avec un petit quelque chose en plus. Mélange de crainte et d’envie, d’humilité et de rêves de record. Ca prend aux tripes, l’estomac se noue.
On retrouve Charlie qui tient le stand présentant le marathon de Rennes. Les copains de Noyal-Pontivy sont là en voisins. Momo qui en a gros sur le cœur avec son ménisque en vrac. Les Christelle’s qui vont courir le lendemain, Eric qui accompagne sa femme et rumine sa déception du marathon de la Côte d’Amour d’il y a 15 jours.
On croise pas mal de connaissances, Xavier, meneur d’allure des 3h, Benoit, Christian et Jacqueline de notre club de la JA Melesse.

Et voilà Alain, mon camarade de club et voisin castelgironnais. Avec Alain, nous avons partagé quelques séances d’entrainements de nos préparations marathon puisqu’il est aussi entrainé par Charlie. Nos profils et nos records sont proches, même si je suis souvent petit peu devant lui. D’ailleurs, nous n’avons pas travaillé la même allure, je dois être devant cette fois aussi.
Alain n’a pas l’air serein. Il s’inquiète d’être fatigué, il a longtemps cherché le village marathon, son cardiofréquencemètre montre des signes de fatigue grandissants. J’espère qu’il va surmonter tous ces tracas.

Avec Thierry, nous ne nous attardons pas au village marathon. On a vite fait de perdre pas mal d’énergie et nous voulons arriver frais et dispos au départ le lendemain.
La soirée passera vite. Avec mon grand copain, je suis bien, serein, en confiance. Nous investirons la chambre d’étudiant du fils d’une collègue pour une pasta-party sage.
Le rituel du dossard me met en peu plus dans la course.

Nous serons au lit à 22h.

Réveil : 7h47 !!! J’avais pourtant mis ma montre à sonner à 7h ! Pas de panique, il reste du temps, le départ est à 10h. On se prépare tranquillement. Un petit doute commence à s’immiscer dans mon esprit : j’ai mal à la gorge. Ca m’a tracassé cette nuit. C’est léger, mais ça m’inquiète.
Je profite d’un moment de calme pour me relaxer. J’ai enfilé la ceinture de mon cardio : le résultat est inquiétant : 80 ! Même en respirant calmement, je n’arrive pas à descendre à moins de 75. Aïe aïe aïe. C’est au moins 15 pulsations de trop ! J’essaye de passer outre, de me préparer calmement, mais le doute s’installe.

Nous rejoignons la ligne de départ en marchant tranquillement les 2,5 km du trajet. C’est agréable, on se chauffe très doucement, on s’acclimate. Les conditions sont idéales : temps frais mais le ciel bleu annonce un beau soleil. Il n’y a pratiquement pas de vent.
Je jette un œil craintif à mon cardio : ça va, c’est haut mais honnête.

En arrivant sur le port, nous assistons au départ des "Foulées du Golfe". Avec Thierry, nous guettons les Christelle’s, mais dans la foule on ne les voit pas.
Aux pieds des remparts de Vannes, la frénésie habituelle des avant-courses est bien présente. On voit que l’organisation est rodée, pas de cohue : ni au dépôt des sacs à la consigne, ni au passage aux toilettes : c’est parfait.
Mon échauffement est des plus sommaires : 5’ de footing grand maximum. Juste le temps d’essayer de me rassurer en ne voyant pas les pulsations s’envoler.


Je me place parmi les coureurs 7 minutes avant le départ sans aucune bousculade. Par-fait. Je suis à côte du meneur des 3h15. Je retrouve Alain, on se salue. Alain persiste dans sa malchance : il a heurté un chien de chasse en venant ce matin. Quelle déveine !
H-3’, c’est le feu d’artifice. Un peu surprenant, en plein jour visuellement ça ne donne pas grand-chose.

Nous y voilà, Go ! Dans les 3 prochaines heures et quelques, je vais jouer l’aboutissement de 2 mois de préparation, d’investissement physique et moral. C’est émouvant comme à chaque départ.
Je ne sais pas comment je me suis débrouillé, mais je me retrouve vite derrière Alain, en plus coincé derrière le meneur des 3h15. Le départ en descente me permet de me dégager du peloton qui se forme derrière lui. Premier km : 4’32’’ bien qu’en descente. C’est pas bon du tout ! D’autant que le cœur flirte déjà avec les 160 alors que je m’étais fixé 155 jusqu’au 10ème km. Pas le temps de réfléchir, après avoir longé le port, une première petite bosse m’oblige à ralentir pour ne pas affoler le cardio. Malheur, le meneur des 3h15 repasse devant. Dès la bosse passée, je commence à remonter mais une côte plus prononcée m’oblige à freiner de nouveau. Patatras, cette fois, je suis aspiré par le peloton de plus en plus dense des 3h15. Ca joue des coudes.
J’ai pourtant doublé Alain qui s’est arrêté soulager sa vessie. 2ème km en 4’45’’. Pfffff, dans ma tête, c’est fini, foutu, crâmé. Je n’y crois plus.

Pendant le 3ème km, en faux-plat descendant, je fais le point. Je cours et je ne souffre pas. Certes, le rythme n’est pas celui que j’espérais mais j’arrive à doubler la meute des 3h15 pendant ce km. Je négocie avec moi-même : « si c’est foutu, pourquoi tu ne t’arrêtes pas alors ? ». Bon sang, je ne vais pas m’avouer vaincu après 3 km quand même !
Allez, je continue et je respecte mon plan de course, on verra bien.

Cet abattement précoce a au moins un avantage, le moral ne peut que remonter. Tous les kilomètres supplémentaires sont des kilomètres gagnés.
Je me concentre sur ma fréquence cardiaque, je dois bien regarder ma montre toutes les 30 secondes. Comme je n’ai pas la forme de rêve, je ne veux pas risquer une fin de course difficile. Donc prudence.

Le parcours est divertissant. Le long cortège de coureurs part vers la campagne vannetaise. La route, d’abord mauvaise se transforme carrément en chemin. Voici Arcal, « le village où t’a pas mal ». Quel accueil : tous les habitants sont au bord de la route, vêtus de costumes de Gospel en sac poubelle. La sono diffuse « Happy Days ». J’adore cette ambiance de kermesse.
Tiens dans cette montée, pas de meneur des 3h15. Bonne nouvelle, il semble que je m’en suis complètement dégagé.
Autre village, autre animation. Cette fois, on nous propose des crêpes (sans façon pour moi) et de la soupe au potiron. La soupe n’est pas prête, mais je vois que tout le monde s’affaire. La soupe sera prête au 2ème tour.
Bon, déjà 5km. Un rapide calcul me permet de constater que je tiens un rythme de 4’32’’/km. Autre bonne nouvelle, le cœur a un peu baissé de rythme. L’inquiétude du départ est dissipée, je m’installe peu à peu dans ma course. La flamme de l’espoir renaît un peu. Je reste vigilant, suivant jusqu’à l’obsession ma fréquence cardiaque.

Le parcours est toujours très agréable. Nous courons sur un sentier de bord de mer. Si le rendement du sol n’est pas bon, c’est très joli avec ce beau soleil d’automne. Il n’y a pas beaucoup de densité de coureurs, les places sont maintenant bien établies, il suffit de suivre d’autant qu’il y a peu de place pour doubler.
Toujours dans ma stratégie prudente, je ne souffre pas, le parcours est sympa. Sans la pression du chronomètre à chaque kilomètre, je serais presque relax. Le chronomètre justement, je m’attache à ne pas calquer ma course dessus. D’une part parce que le revêtement changeant (chemin, sentier, route) ne permet pas d’être constant et d’autre part parce que j’essaye de ne me fier qu’à mon rythme cardiaque.
Mais l’habitue est bien ancrée. A chaque km, je regarde le temps indiqué par ma montre et je calcule… D’ailleurs au détour d’un virage, je constate que le groupe des 3h15 est à 200m derrière… et Alain est juste devant ! Je suis content pour lui.
On revient vers le port. Une belle route goudronnée et régulière. Je m’applique à retrouver les sensations et le relâchement de l’entrainement pendant les longues séances d’allure marathon.

Petit coucou à Françoise venue encourager la JA Melesse et prendre des photos. Distrait je loupe le 9ème km et me voilà au 10ème. 45’22’’. Rapide calcul (je calcule tout le temps quand je cours), 22’’ de plus que 4’30’’/km, ça doit me mettre sur un rythme de 3h11-3h12.

Les kilomètres défilent vite, nous repassons sur le port, longeant le chenal pendant 2km d’un côté puis de l’autre côté en sens inverse. Je guette l’autre rive. A l’aller, je regarde la tête de course, cherchant mon copain Pierrot qui court en duo, tandis qu’au retour, je mesure avec plaisir la distance qui me sépare des meneurs plus lents.

Au bout du chenal, nous repartons sur des chemins de bord de mer. Je repère le km 33. C’est là, dans un tour que la course commencera.
Françoise a traversé le chenal, nouvelle photo, nouveaux encouragements qui font du bien.

Oh là, le parcours est rude. Ici aussi, le rendement n’est pas bon, mais en plus c’est accidenté. Pour le moment, c’est facile, mais je m’imagine dans un tour avec 20 km de plus dans les jambes : ça ne va pas être une partie de plaisir.

C’est vraiment magnifique, il y a de belles photos à faire, notamment lorsque nous courons sur une digue au milieu des bateaux. L’eau reflète l’image des coureurs, un moment de quiétude juste avant le début des hostilités.
Parce que juste derrière, le parcours serpente dans la pinède. Quelques bosses, des racines. J’ai mal à l’avance. Pour le moment, je ne pense qu’à arriver au semi, frais et sans douleur. Mais le parcours commence à me marquer un peu, les jambes tirent légèrement.
Au détour d’un virage, je découvre Momo, au milieu de nulle part. Ca me fait sacrément plaisir de le voir là. Une belle photo et une super poignée de main me donnent la banane. « Tu es bien ! » me lance Momo. Raaah, ça fait du bien.


Allez, encore 1 km et c’est le passage de relais pour le Duo marathon. Ouh là, mais il y a une sacrée côte avant l’arrivée au stade. Ca correspond exactement au 41ème km au second tour. Ca va être rude.
Pour le moment, je suis frais, je m’applique à monter à ma main. Je reprends pas mal de duettistes partis trop vite.
Me voilà devant le stade de Kercado, ce sera l’arrivée dans un tour. Il y a beaucoup de monde. Charlie est là, il me demande des nouvelles. « La FC ca va, les jambes pas terribles ». Ce n’est pas forcément clair, mais je n’ai pas le temps de développer plus.

Allez, 20 km, bientôt le semi. On entre dans le centre historique. Ca monte, ça descend. Je double le premier relais féminin. Voilà le semi : 1h35’57’’. Le calcul est facile : 3h12 si je ne faiblis pas.

A présent, on redescend vers les remparts puis le port, retour à la case départ. Enfin, presque, parce que si on ne passe pas en prison, les malicieux organisateurs ont prévus quelques détours par la vieille ville. C’est joli, ces rues piétonnes, mais les pavés, les relances à angle droit qui se succèdent, ça n’est pas très bon pour les jambes de marathonien.

Le long des remparts, c’est le désert, plus personne autour de l’aire de départ. D’ailleurs, je remarque que les installations en contrebas ont déjà été démontées et rangées. Ca n’a pas trainé !
Sur le port en revanche, il y a foule. Je me fais un petit plaisir en tapant dans les mains des enfants. Revoilà les 2 bosses qui m’ont ralenti tout à l’heure. Je les avale calmement, sans me mettre en surrégime. Je compare les temps au km avec ceux du premier tour. Ca se vaut alors que j’ai très peu dérivé en fréquence cardiaque. C’est bon pour le moral ça. En plus l’esprit occupé, je suis pratiquement arrivé au 25ème km sans m’en rendre compte. Encore un bon point pour le moral. Pierre par pierre, en une boucle, je me suis reconstruit un mental de compétiteur. C’est fragile, mais j’y crois à nouveau.

Arcal et son groupe de Gospel-poubelle puis la soupe de potiron est servie. J’adore ce passage dans les villages. Certes, les chemins ont toujours un rendement médiocre, mais je commence à remonter pas mal de coureurs partis trop vite. Mince, j’aurais du compter à partir du semi. Pour le moment, personne ne m’a doublé à part les relayeurs du duo.
Courir en bord de mer sous le soleil, c’est un grand plaisir. Pour ajouter à l’agrément, les granules d’Arnica ont soulagé mes jambes, à la grande surprise de mon esprit cartésien.

Le 30ème km est en vue et je n’ai toujours pas sortie mes « soutiens moraux ». Pas encore, c’est trop tôt. La fréquence cardiaque monte doucement, comme je l’avais prévu avant la course. Je me fixe le km 33 pour vraiment commencer la course. Je sais exactement où il est et quel est le parcours à venir puisque je l’ai déjà parcouru il y a moins de 2h.
26, 27, 28, 29, 30, ça défile, je double. Le circuit serpente. Avant de jeter un coup d’œil en arrière, au même endroit qu’au premier tour, j’espère voir Alain. Il est là, toujours à 200m derrière moi. Extra, on s’échange à nouveau un grand signe de la main.

De retour le long du port, le cardio a une fâcheuse tendance à bipper. Je l’ai réglé pour qu’il m’alerte au dessus de FC 168. Je freine mais c’est dommage, je commençais à espérer un negativ split (un second semi plus rapide).


Doucement, ne pas s’emballer au contact du public au passage dans le port. Le km 33 n’est toujours pas en vue. D’ailleurs, je repousse d’un km, j’attends le panneau des 34 pour entrer dans le dur. C’est à ce moment qu’on quitte le port et le parcours plat pour rejoindre à nouveau un petit chemin en bord de mer.

Alors que je chassais un coureur de l’Anjou depuis des km, au moment de le passer, une petite bosse me calme. Je me recale derrière mon coureur angevin. Nous allons bon train. L’allure a chuté à 4’50’’/km, mais on tient bon et le chemin n’est pas favorable. Je me contente de ce rythme surtout que nous doublons pas mal de coureurs en souffrance.
Je commence à sortir mes pensées de soutien. Je pense à ma femme, mes garçons, aux messages reçus hier et ce matin encore. Je pense aussi à mon collègue Greg, récemment accidenté, qui aimerait bien avoir mal aux jambes d’avoir trop couru.

Le km 37 fait une boucle, on se croise. Je guette un éventuel retour du meneur des 3h15 (j’apprendrai plus tard qu’il a abandonné), mais personne en vue. Pourtant, les calculs vont bon train dans mon esprit. Il faut que je passe sous les 3h15, c’est mon objectif officiel, je m’en contenterais très bien aujourd’hui.
Je suis un peu inquiet quand je pense au 41ème kilomètre qui monte sec. Ca va être juste juste.

Km 38, ravitaillement. Plus que 4 km, mais c’est dur, dur, dur. Je quitte le ravitaillement en petite forme. C’est à ce moment que je vois débouler Alain de l’arrière. « Tu ne pouvais pas mieux tomber ! » lui dis-je.
Il me dépasse et me harangue à le suivre. Je force 10 secondes et je lâche : « Vas-y, je suis cuit ». C’est à ce moment que mon marathon bascule. Si Alain était parti comme je le lui disais, mon marathon se serait terminé par une lente agonie.
Mais non, Alain est un gars extra. Il m’engueule pour que je le suive.
Je m’accroche. C’est dur mais je colle au train. On reprend au passage le gars de l’Anjou : notre duo devient trio. 4’51’’, plus que 3 km ! Tiens, je me retrouve en tête et c’est Alain qui s’accroche derrière. Nous allons alterner les coups de moins bien et les relances.
On s’encourage, on s’invective. La bagarre, ne rien lâcher, ne pas écouter la petite voix qui dit de s’arrêter.
Km 40 : Voilà, c’est le moment de vérité. Dans quelques mètres, nous aborderons la montée finale. Je démarre au train, bien décidé à tenir. Notre angevin est foudroyé par une crampe, il s’arrête. J’ai pris 10 mètres à Alain, je l’engueule pour qu’il revienne. Il s’accroche, remonte… et commence à me lâcher !

Nous sommes en haut de la bosse, Km 41. Je marque le lap sur ma montre : il me reste exactement 5'15’’ pour faire les 1 195m restants. Je ne suis plus très lucide, je sais juste que ce sera très très juste. En un éclair, je me lance « N’aies pas de regrets ! ».

Heureusement, la route est en légère descente. Je relance du plus fort que je peux, plus rien d’autre ne compte. A fond, dans 5’, ce sera fini.
Je file, je ne pense plus à rien, le public nous encourage. A 500m de l’arrivée, je vois Thierry qui m’attend en trépignant ! Il se place à mes cotés, il me relance, m’encourage. Nous arrivons sur la piste, encore 300m. Je me grandis sur les conseils de Thierry, je lève les genoux. 200m, 100m. Je lève les yeux, je vois le chronomètre qui indique 3h14’30’’. Il reste moins de 100m, c’est gagné, même pour le temps scratch ! Cette dernière ligne droite est un moment de bonheur que je savoure. Je serre les poings, je hurle ma joie, mon enthousiasme.



3h14’54’’ scratch, 3h14’45’’ couru. J’y suis. YES !!! Je me retourne pour attendre Alain. Il est là, il arrive. Je chavire, nous tombons dans les bras l’un de l’autre. Charlie est là aussi, il est transporté de joie. Thierry rejoint la fête. Ca y est mon pote, je l’ai eu, j’ai gagné !
Je savoure ces moments. Je sais déjà que je vais les revivre un bon paquet de fois dans les jours à venir. Quelle course !

Les crampes sur la table de massage, la belle ampoule sous le pied gauche, le coup de pompe d’après course, la trachéite qui m’ennuiera pendant 2 jours encore. Rien ne viendra gâcher mon bonheur. Les amis marathoniens présents, les messages de félicitations, et les copains que je retrouverai au stade dans la semaine prolongeront encore mon rêve éveillé.

Que c’est bon un beau marathon. Après un bon gueuleton avec mon pote Thierry et un voyage retour qui passera encore plus vite que l’aller, au moment de retrouver ma famille, je suis fier, j’ai couru mon marathon en marathonien aguerri. Je n’ai pas lâché malgré des sensations très moyennes. J’ai appris énormément et tiré la certitude que je suis capable de belles choses sur le marathon.


Place à la récupération puis la saison de cross. Ensuite, sur un parcours roulant, avec un pouls au repos plus bas... j’y crois fort !
Cet épisode n’est pas le dernier de mes comptes-rendus. L’histoire se poursuivra, certainement au printemps…



Bruno

Nouvoitou, le 21 octobre 2010

7 commentaires:

charlie le hoangan a dit…

Merci bruno pour ce très beau moment de course à pied, dire que certains coureurs nous opposent : "moi, ce n'est pas comme vous, je cours pour le plaisir". Ils voudraient nous faire passer pour des gars et des filles qui font de la course comme on va à la mine. En fait, ils ne connaissent pas le plaisir d'avoir donné le maximum, le jour J en aboutissement de plusieurs semaines de préparation, où il y avait des doutes mais aussi des moments de sérénité ou bien de sentiment de bien avancer vers ... l'incertitude de la compétition.

Félicitations pour ta ténacité et ta prose qui n'est pas si longue.

France a dit…

Bravo Bruno pour ce beau chrono. je suis contente pour toi. Ce marathon est en plus très sympathique avec beaucoup d'animation. a+
France

Oliv a dit…

Superbe récit Bruno, très belle course que tu nous livre. J'ai vraiment hâte de te revoir cet hiver pendant les cross, p... tu vas encore me mettre une mine :-/ !!

Michel .v a dit…

quel joli récit,c'est long mais c'est comme une préparation marathon.....
bravo pour ton chrono car il est vraiment canon.
bonne récup Bruno et je pense que tu va encore t'amélioré car tu ne lache rien et les cross il parait que tu aimes ça ...
michel

OLM a dit…

Bravo à toi Bruno, pour n'avoir rien lacher, pour ton chrono, l'objectif atteint. A bientôt sur la piste à Cesson.
Olivier

OLM a dit…

Bravo à toi pour ton chrono, ta performance, n'avoir rien lacher, atteint ton objectif et ton récit de course.

Philippe L. a dit…

Encore un super CR de Bruno qui prouve que la tenacité paie et que la course à pied fait vivre de fabuleux moments. BRAVO Bruno
Philippe